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Hydroélectricité écologique

Table des matières

Comment faire de l’hydroélectricité… écologique ?

L’hydroélectricité participe pleinement au mix énergétique français. Elle est la première source d’énergie renouvelable en France, et la première dans le monde !  

Cette source d’énergie décarbonée suscite néanmoins plusieurs critiques. Il lui est reproché son impact sur les milieux aquatiques et sur la biodiversité. Au vu de l’importance des enjeux environnementaux qui sont les nôtres aujourd’hui, peut-on concilier hydroélectricité et écologie 

Manon Lamboley, ingénieur environnementNotre experte : Manon Lamboley

Manon Lamboley, Ingénieur Environnement et responsable hydraulique et environnement chez UNITe, nous donne quelques éléments de réponse. 

L’interview

Au format vidéo :

Retrouvez le podcast :

Hydroélectricité : le géant oublié ? 

La place de l’hydroélectricité en France

  • La production hydroélectrique est la première source d’énergie renouvelable en France ! Étonnamment, lorsqu’il est question d’énergie « verte », l’hydroélectricité est souvent oubliée au profit de l’éolien et du photovoltaïque. Son rôle est pourtant considérable. 
  • En France, toutes énergies confondues, l’hydroélectricité arrive en deuxième position. Elle représente 10% de l’électricité consommée en 2022, derrière le nucléaire (68%). Pendant les pics de consommation, la part de l’hydroélectricité peut monter jusqu’à 20%. 
  • C’est la plus ancienne source de production électrique en France, et l’une des premières à avoir été développée à grande échelle en Europe. 

En 2022, le parc hydroélectrique français était constitué de 2400 centrales :

  • Environ 2300 petites centrales, détenues par des producteurs autonomes : c’est la petite hydroélectricité. 
  • 100 grandes centrales, avec barrages et bassins de retenue, qui produisent 65 Twh/an (3 fois plus que l’éolien !) : c’est la grande hydroélectricité. 

Comment fonctionne une centrale hydroélectrique ? 

La production d’énergie se fait en plusieurs étapes : 

  • L’eau est d’abord captée via une prise d’eau, ou conduite, aménagée sur le cours d’eau, le barrage ou la retenue.
  • En entrant dans la centrale, l’eau met en mouvement une ou plusieurs turbine(s) : L’énergie cinétique du courant d’eau est transformée en énergie mécanique
  • L’énergie mécanique est transformée en électricité via un générateur électrique, couplée à un transformateur / alternateur.
  • L’électricité produite est raccordée au réseau électrique et mise en circulation.
  • L’eau quitte la centrale et rejoint le cours d’eau, sans transformation de son état. 

 

Il faut distinguer l’hydroélectricité « au fil de l’eau », c’est-à-dire les centrales hydroélectriques aménagées en plaine ou en montagne (centrales de haute, moyenne ou basse chute, en fonction du débit et du dénivelé) et l’hydroélectricité produite par des centrales de retenues (barrages, écluses, lacs) qui permettent de stocker l’eau et de produire de l’électricité à la demande.

Une énergie « verte » qui offre de nombreux avantages

  • La production d’énergie hydroélectrique est une technologie ancienne, fiable et maîtrisée.
  • Elle est presque totalement décarbonée : la production d’électricité ne génère pas de gaz à effet de serre. Les seules émissions (minimes) sont occasionnées lors de la construction de la centrale. 
  • Elle ne consomme pas d’eau : après le passage en turbine (turbinage), l’eau est entièrement restituée, sans perte ni altération, au cours d’eau. 
  • Elle n’est pas polluante et ne produit pas de déchets. 
  • Les équipements ont une très grande durée de vie : 40 ans minimum mais les installations hydroélectriques peuvent durer jusqu’à 100 ans. 
  • C’est l’énergie qui procure le meilleur rendement énergétique, toute énergie confondue !
  • Elle n’est pas intermittente.
  • Elle est stockable : cette caractéristique permet, en cas de besoin, de mobiliser une importante puissance en un temps record (pics de consommation)
  • Elle est modulable.
  • C’est une énergie très appréciée. Plus de 80% des français lui sont favorables.

L’hydroélectricité présente aussi de nombreux bénéfices annexes : 

  • Les retenues d’eau peuvent être utilisées pour d’autres usages :  arrosage des cultures, irrigation, eau potable, refroidissement des centrales nucléaires, etc.
  • Elle est compatible avec le développement touristique et sportif des territoires : pêche, tourisme, agriculture, loisirs, sports en eaux vives. 
  • Elle génère des revenus pour les communes et les propriétaires.
  • Elle permet de créer des emplois en zones rurales et isolées (30 000 emplois directs / indirects en 2020)

Concilier hydroélectricité et écologie, est-ce possible ? 

Si les avantages de l’hydroélectricité sont bien connus, la présence d’installations hydroélectriques n’est pas sans conséquences sur le milieu aquatique qui les héberge. Le turbinage modifie non seulement l’hydrologie* des cours d’eau, mais il impacte aussi la biodiversité et bouleverse la circulation de certaines espèces de poissons. 

*L’hydrologie : la science qui s’intéresse à tous les aspects du cycle de l’eau (…). L’hydrologue contribue à la connaissance et gestion des ressources en eau et à leur durabilité en rapport avec les bassins versants environnementaux (wikipedia)

Les adversaires de l’hydroélectricité dénoncent les effets perturbateurs que peuvent avoir les centrales sur le cours d’eau et son écosystème. 

Une énergie pas si écolo que ça ? 

Infographie :

infographie : hydroélectricité vs écologie

Conséquences négatives pour les poissons

  • Les centrales hydroélectriques constituent un obstacle qui empêche la montaison et la dévalaison des espèces migratrices, comme le saumon ou la truite de mer. Ces espèces emblématiques remontent les rivières pour se reproduire avant de redescendre vers la mer.
  • Risque important de blessures au contact des pales des turbines.
  • Mortalité des poissons qui se retrouvent bloqués ou qui sont blessés au passage de la turbine. 

Conséquences sur le dépôt de sédiments

  • La centrale hydroélectrique bloque l’écoulement naturel des sédiments (sables et graviers) vers l’aval. 
  • Cela peut engendrer, à terme, une érosion importante du lit du cours d’eau et un déficit de substrat aux conséquences importantes puisque de nombreux poissons y déposent leurs œufs.  

Restaurer la continuité écologique par des équipements adaptés 

Des solutions techniques existent pour pallier les conséquences négatives énoncées plus haut. Ces équipements permettent de faciliter la circulation des poissons (montaison et dévalaison) et d’assurer le transfert des sédiments vers l’aval. 

La continuité écologique est ainsi préservée dans le milieu impacté.

Protéger les poissons

  • Les passes à poissons
    Très connus, ces dispositifs de franchissement permettent aux poissons, via de petits bassins connectés, de franchir la centrale hydroélectrique sans encombre.
  • Les rampes à anguilles
    Sur le même principe, les rampes à anguilles (un autre poisson migrateur) se caractérisent par la présence d’aspérités : elles aident le poisson, dépourvu de nageoires, à remonter.
  • Plan de grille fine et exutoire de dévalaison
    Afin de permettre aux poissons de redescendre (dévalaison) sans être blessé, l’entrée de la conduite qui amène l’eau vers la centrale hydroélectrique doit être finement grillagée. Cette grille va non seulement empêcher le passage des poissons, mais aussi l’infiltration de déchets plastiques ou organiques. Pour descendre, les poissons empruntent un autre passage, dit exutoire de dévalaison.
  • Des turbines ichtyocompatibles 
    Les turbines nouvelle génération se veulent fish-friendly ! Ces nouveaux modèles ne blessent plus les poissons s’ils s’aventurent dans la turbine.

Permettre le transit sédimentaire

  • Mise en place d’un système de décharge (vanne ou châsse, système manuel ou automatisé) pour permettre l’évacuation des sédiments accumulés vers l’aval et maintenir le lit du cours d’eau dans son état d’origine. 

La méthode ERC – Eviter, Réduire, Compenser

Avant de mettre en œuvre un projet hydroélectrique, UNITe collabore avec les acteurs locaux et les services de l’Etat pour anticiper au maximum les impacts négatifs et les éventuelles atteintes à la biodiversité. 

Une fois ces impacts identifiés, UNITe applique la méthode ERC 

  • Éviter : Le projet ou une partie du projet peut être modifié avant la construction. Par exemple : modifier le tracé d’une conduite, éviter une zone sensible, etc….
  • Réduire : S’il n’est pas possible d’éviter, UNITe va chercher à réduire au maximum l’impact négatif de ses installations. Par exemple : mise en place d’un passe-poissons et d’un exutoire de dévalaison. 
  • Compenser : Si l’impact négatif est avéré, UNITe s’engage à le compenser, sur le même site d’exploitation ou sur un autre emplacement. 

Cette méthode implique de mener des études d’impact approfondies. 

UNITe participe régulièrement à des programmes de recherches et de protection sur des espèces endémiques. Le groupe s’est joint, par exemple, à un important programme de recherches sur l’anguille dans la Seine. 

La protection législative

Directive européenne et Loi LEMA

  • La Directive européenne 2000/60/CE du 23 octobre 2000 a permis une harmonisation de la réglementation européenne en matière de gestion de l’eau. Cette directive énonce l’obligation de préserver, et au besoin de restaurer, la qualité des eaux et des milieux aquatiques. 
  • En France, les grandes lignes de cette directive ont été adoptées par la loi LEMA (Loi sur l’Eau et la Protection des Milieux Aquatiques) du 30 décembre 2006. 
  • Cette loi a mis en place le principe du « débit réservé » : une centrale hydroélectrique doit garantir en permanence l’écoulement vers l’aval de 10% du débit moyen annuel du cours d’eau, afin d’alimenter le lit de la rivière et assurer la continuité écologique.

Le classement des cours d’eau

L’article L214-17 du Code de l’Environnement a défini deux types de classement de certains cours d’eau : 

  • Les cours d’eau dits en bon état écologique (liste 1), identifiés comme des réservoirs biologiques pour des espèces migratrices amphihalines (qui passent de l’eau de mer à l’eau douce et inversement). La loi LEMA stipule qu’il est interdit d’y construire de nouveaux ouvrages hydroélectriques. 
  • Les cours d’eau dits à restaurer (liste 2). Sur ces cours d’eau, les services de l’Etat estiment que tout ouvrage hydroélectrique doit être équipé pour assurer la bonne circulation des poissons migrateurs et des sédiments. 

L’avenir de l’hydroélectricité ? Difficultés et challenges

Une énergie décarbonée qui demeure essentielle

La Programmation Pluriannuelle de l’Énergie 2019 (PPE) a réaffirmé l’importance des énergies renouvelables dans le mix énergétique français. Cette planification, de même que la récente loi sur la Transition énergétique, semble confirmer la place essentielle de l’hydroélectricité en France, aux côtés de l’éolien et du photovoltaïque. 

L’hydroélectricité apparaît d’autant plus essentielle qu’elle permet d’équilibrer et de sécuriser le réseau électrique. Quand se produit une forte demande ou une pointe de consommation, la filière peut répondre très rapidement à la demande grâce au stockage de l’eau dans les barrages et réservoirs. 

Elle est donc essentielle dans le processus de décarbonisation de nos énergies et dans la lutte que nous menons contre le réchauffement climatique. 

Mais des exigences environnementales renforcées

L’un des grands enjeux actuels de l’hydroélectricité est d’assurer la modernisation et la compatibilité du parc existant aux exigences environnementales renforcées. 

Avec le durcissement des politiques environnementales et la conscientisation croissante du public, les projets hydroélectriques de demain doivent naviguer un arsenal législatif complexe et adresser  des enjeux environnementaux toujours plus contraignants. 

En dépit des coûts élevés que cette nécessité peut engendrer, il est essentiel pour UNITe de pousser dans cette direction.  

Une production énergétique menacée par le réchauffement climatique ? 

Récemment, la France a connu des épisodes de sécheresses et une plus grande variabilité de la pluviométrie, ce qui a des conséquences sur le niveau des cours d’eau où sont installées les centrales. Ces deux états de fait sont des conséquences avérées du réchauffement climatique. 

L’impact de cette hydrologie variable, et à terme la raréfaction de l’eau, va constituer un enjeu majeur dans les décennies à venir. 

Il va être nécessaire de s’adapter rapidement à ces changements annoncés. Plusieurs pistes de réflexion sont actuellement explorées pour optimiser les centrales hydroélectriques : 

  • adapter la production d’électricité à un débit plus faible
  • augmenter la capacité de stockage des réservoirs
  • prévenir les futurs conflits d’usage et travailler à une bonne distribution de la ressource.

Conclusion

Oui, l’hydroélectricité est une énergie écologique. 

Evidemment, il ne faut pas nier l’impact des ouvrages hydroélectriques sur les écosystèmes. Comme le souligne Manon Lamboley, il n’existe malheureusement pas de système de production d’énergie sans incidence. Il est essentiel, en revanche, de prendre connaissance de ces impacts, de les étudier, et de proposer des solutions acceptables pour permettre de lier production d’électricité et respect de l’environnement. 

UNITe, fort ses 35 ans d’expérience dans l’hydroélectricité, accompagne les projets hydroélectriques de la conception à l’exploitation, toujours dans le respect des enjeux environnementaux et écologiques. 

Vous êtes une commune et vous avez une rivière que vous pensez exploitable ?

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