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La transition énergétique n’est pas seulement un impératif écologique : elle représente aussi une formidable opportunité pour l’emploi en France. Porté par l’urgence climatique et la nécessité de transformer nos modes de production et de consommation, le secteur de l’énergie et des EnR recrute et forme à grande échelle. Mais cette dynamique se heurte à un défi majeur : la pénurie de main-d’œuvre qualifiée. Pour répondre à l’ampleur des besoins, l’offre de formations doit non seulement s’étoffer, mais aussi s’adapter étroitement aux attentes du marché et des entreprises.
La transition énergétique : une opportunité historique pour l’emploi
Des besoins massifs en recrutement
Selon une étude récente publiée par le Syndicat des énergies renouvelables (SER) et le cabinet EY, plus de 236 000 emplois liés à la transition énergétique et aux EnR pourraient être créés d’ici 2028, et près de 300 000 d’ici 2030.
Le secteur du solaire et de l’éolien, à eux seuls, représentent plus de 100 000 postes à venir.
Cet formidable essor repose sur deux dynamiques complémentaires :
- l’électrification des usages (mobilité, chauffage, industrie), qui accroît fortement la demande en électricité
- le développement massif des énergies renouvelables, qui implique la construction d’infrastructures et l’adaptation des réseaux électriques existants.
Pour les seuls métiers liés aux réseaux électriques, RTE et Enedis annoncent que 43 000 recrutements seront nécessaires d’ici 2030. RTE estime même qu’il faudra à terme former et recruter près de 500 000 techniciens pour atteindre les objectifs du mix énergétique 2050. Le groupe a déjà annoncé près de 200 milliards d’euros d’investissements d’ici 2040 pour adapter le réseau au changement climatique, à la mobilité électrique et à l’intégration des énergies renouvelables.
Des profils variés en forte demande
Les nouveaux métiers de la transition énergétique sont particulièrement attractifs parce qu’ils offrent stabilité professionnelle et perspectives d’évolution, de bons salaires et la satisfaction de contribuer à un modèle énergétique plus durable.
La seule filière photovoltaïque représente un important vivier d’emplois.
- Les techniciens spécialisés (électriciens, installateurs photovoltaïques, monteurs de bornes de recharge, etc…) figurent parmi les profils les plus recherchés, mais ces métiers techniques sont loin d’être les seuls concernés.
- La filière recrute aussi des cadres, des ingénieurs spécialisés, des gestionnaires de projets, des commerciaux, des communicants ou encore des chercheurs.
L’offre de formation
Face à la croissance rapide des besoins, les formations traditionnelles (lycées professionnels, universités, etc) peinent à répondre à l’urgence et à la réalité du terrain. Certaines présentent un déficit de lisibilité pour les candidats, notamment ceux en reconversion, et sont parfois jugées trop longues ou trop théoriques. La rapidité des évolutions technologiques exige pourtant des profils immédiatement opérationnels.
Il devient donc indispensable de repenser et d’adapter les formations, pour les rapprocher des besoins concrets des entreprises et des territoires.
Les principaux défis sont les suivants :
- Faire connaître ces formations et les débouchés qu’elles proposent
- Rendre les parcours plus professionnalisants, en phase avec les besoins concrets des entreprises.
- Ouvrir ces opportunités à tous les publics, jeunes en formation initiale comme adultes en reconversion.
L’Étincelle : une école pour former les techniciens de demain
Parmi les initiatives récentes, l’Étincelle illustre parfaitement cette nouvelle génération de formations, tournées vers l’opérationnel et les besoins de recrutement actuels. Fondée en 2023 par Paul Munos, Xavier Fraysse et Geoffrey Poirrier, l’école souhaite répondre à la pénurie de techniciens spécialisés dans les énergies renouvelables (EnR) et aider les entreprises à recruter, en CDI et en alternance. Elle forme sur trois métiers techniques : installateur de panneaux photovoltaïques, installateur de bornes de recharge, et électricien.
L’interview : Paul Munos
En vidéo :
Paul Munos, cofondateur de l’Étincelle, revient sur la spécificité de l’école, les formations dispensées et les besoins en recrutement dans le secteur des énergies renouvelables.
Retrouvez le podcast :
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Des formations autour des métiers de l’électricité
L’Etincelle propose trois formations ciblées, décliné en deux formats :
- Deux parcours professionnalisants de 8 semaines, courts et intensifs : « installateur de panneaux photovoltaïques » et « Installateur de bornes de recharge pour véhicules électriques ». Ces formations délivrent les habilitations et des compétences nécessaires pour être opérationnel auprès des entreprises et débouchent donc directement sur une prise de poste en CDD/CDI.
- Un parcours diplômant plus long (1 an), en alternance, pour valider un diplôme de « technicien en électricité » de niveau bac. Ce diplôme, reconnu par l’État, offre un parcours généraliste autour des métiers de l’électricité, mais les apprenants sont libres de se spécialiser en optant pour une alternance dans le secteur du bâtiment, du tertiaire, de l’industrie ou auprès d’une société d’installation de panneaux PV ou IRVE.
Une offre adaptée à la réalité du terrain
- L’école mise sur 70% de pratique grâce à des campus équipés de plateaux techniques dernier cri. Les élèves sont encadrés par des formateurs qui sont aussi des professionnels en activité, et les promotions ne dépassent jamais 15 à 20 personnes.
- Les enseignements ont été conçus en partenariat avec des entreprises, afin de garantir l’opérationnalité des apprenants dès la sortie d’école et une insertion immédiate sur le marché de l’emploi.
Le métier d’installateur de panneaux photovoltaïque, par exemple, exige une large palette de compétences :
- Le technicien doit apprendre à travailler en hauteur et en toute sécurité, maîtriser des savoir-faire issus du BTP (étanchéité, couverture, etc…), connaître les normes en vigueur ainsi que les habilitations électriques BT/HT (basse et haute tension).
- Il lui faut aussi comprendre le fonctionnement des panneaux et se tenir informé des derniers modèles d’onduleurs sur le marché.
- Sur le terrain, il doit être capable d’intervenir aussi bien sur des toitures que sur de grandes centrales solaires au sol.
Le modèle fait ses preuves : 9 apprenants sur 10 trouvent un emploi à l’issue de leur formation, et l’Étincelle prévoit déjà l’ouverture de nouveaux campus. Objectif affiché : former 10 000 techniciens d’ici 2030. Trois campus sont déjà actifs (Aubervilliers, Lyon et Toulouse).
Des formations ouvertes aux jeunes et aux profils en reconversion
L’accès aux formations est volontairement inclusif : aucune limite d’âge n’est fixée. Les seuls prérequis sont un niveau de français B1 (oral et écrit) et un intérêt pour les métiers manuels.
De fait, les promotions de l’Étincelle accueillent des profils divers : jeunes en formation initiale mais aussi demandeurs d’emploi et salariés en reconversion. Il faut dire que le secteur offre des perspectives pour des professionnels issus du BTP ou de filières en perte de dynamisme, comme la fibre optique. Ces profils expérimentés ne sont pas toujours suffisamment valorisés lors des phases de recrutement, alors même que leur expérience constitue un véritable atout pour les entreprises.
En parallèle, l’école développe également des modules spécifiques pour les salariés en poste, qu’il s’agisse d’approfondir des connaissances techniques ou théoriques.
Elle permet également aux professionnels déjà actifs de valider leurs acquis et d’obtenir des certifications reconnues (QualiPV) pour diversifier leur offre de services.
L’ambition de l’école transparaît jusque dans son nom : provoquer un déclic et donner envie à des jeunes comme à des adultes en reconversion de s’engager dans des métiers porteurs de sens.
Faciliter le recrutement et la valorisation des profils qualifiés
Accompagner les candidats
Si les métiers de la transition énergétique attirent de plus en plus de candidats (salaires d’entrée autour de 2 000 € brut par mois, réelles perspectives d’évolution, sentiment d’utilité et contribution directe à la décarbonation), l’accès aux formations reste parfois complexe. Pour certains, les freins financiers ou administratifs demeurent importants, et les dispositifs d’accompagnement proposés par France Travail ou les OPCO (Opérateurs de Compétences), restent encore trop méconnus. Pour l’Étincelle, comme d’autres écoles spécialisées, un défi majeur consiste donc à mieux faire connaître le contenu de leurs formations mais aussi les conditions d’accès et de financement.
Parmi les initiatives notables, le programme « Écoles des réseaux pour la transition énergétique », lancé en 2023 avec le soutien de RTE et d’Enedis, mobilise déjà plus de 100 lycées professionnels (bac pro et BTS) et développe des parcours de reconversion en partenariat avec France Travail et divers organismes de formation.
La faible féminisation est un autre enjeu, puisque seules 3 à 4% des postulants sont des femmes. L’Étincelle, comme d’autres acteurs, mène des actions de sensibilisation et de recrutement ciblées afin de promouvoir la mixité dans un secteur encore majoritairement masculin.
Aider les entreprises à recruter
Les entreprises rencontrent elles aussi de réelles difficultés pour recruter : manque de temps, ressources RH limitées, attractivité moindre dans certaines zones géographiques. Les organismes de formation peuvent jouer un rôle clé dans ce sens, en accompagnant aussi bien les employeurs que les candidats : appui à l’accès aux financements, présélection de profils adaptés aux besoins exprimés, etc… Ces partenariats renforcent l’efficacité du recrutement et favorisent une insertion professionnelle rapide.
Dans la même idée, certains développeurs d’énergies renouvelables envisagent désormais de constituer leurs propres équipes de techniciens en interne plutôt que d’avoir systématiquement recours à des entreprises extérieures. Une stratégie qui permet de contrôler plus précisément le calendrier de construction des centrales et de sécuriser les projets face aux tensions du marché de l’emploi. Ces perspectives de recrutement ouvrent aussi la voie à des partenariats renforcés avec les organismes de formation, afin d’anticiper les besoins en compétences et de préparer des profils directement opérationnels pour accompagner la croissance du secteur.
Pour les organismes de formation, un autre enjeu consiste à inciter les employeurs à ouvrir leurs portes à des profils en reconversion. Trop souvent perçus comme « atypiques » ou moins valorisants, ces candidats apportent pourtant des compétences transférables et une solide expérience de terrain. Leur intégration représente une véritable richesse pour répondre aux besoins croissants des métiers liés aux énergies renouvelables.
Conclusion
La bataille de l’énergie est aussi celle des compétences. Pour mener à bien le « chantier du siècle » qu’est la transition énergétique, la France doit former et recruter massivement. Des initiatives comme l’Étincelle ou le Battery Training Center, dans les Hauts-de-France, montrent qu’il existe déjà des solutions concrètes pour préparer des milliers de techniciens aux métiers de demain.
A l’horizon 2050, le paysage énergétique sera profondément transformé. Pour y parvenir, l’investissement dans la formation, la reconversion et le développement des compétences est indispensable. Les métiers techniques, en première ligne, sont particulièrement ciblés, mais l’ensemble des professions de la transition énergétique (ingénieurs, cadres, chefs de projets et bien d’autres) offrent de réelles perspectives et des carrières durables dans les énergies renouvelables.