Les éoliennes pour une énergie propre et décarbonée en France

La France possède le deuxième plus grand gisement de vent en Europe. Une situation idéale pour l’énergie éolienne, qui constitue depuis 2020 la 3eme source d’électricité du pays. 

Notre experte : Marie-Yvonnick Legal

Marie-Yvonnick Legal, responsable de projet chez UNITe, nous parle des enjeux qui entourent le déploiement de cette énergie sur le territoire.

L’interview

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Comment fonctionnent les éoliennes ? 

• On appelle énergie éolienne (de Eole, dieu du vent chez les grecs antiques), l’énergie produite grâce au vent. Cette énergie a été utilisée dès l’Antiquité pour la navigation et pour moudre les céréales.  La première « éolienne » industrielle, capable de produire de l’électricité, est inventée en 1890. 

Les 3 types d’éoliennes

Les éoliennes actuelles, ou aérogénérateurs, sont de plusieurs types. 

L’éolien horizontal

• Il s’agit du modèle le plus courant. C’est celui qui procure le meilleur rendement énergétique.

Il est constitué de plusieurs éléments : 

• un mât vertical (jusqu’à 120 mètres)
• une nacelle (dans laquelle se trouve le générateur électrique)
• un mécanisme rotatif, généralement tripale, qui tourne face au vent. 

L’éolien vertical

• Plus rare, l’éolien vertical peut prendre différentes formes. A la différence du modèle classique, il tourne sur son axe à la manière d’une girouette. Il fonctionne par vent faible et offre une meilleure intégration au bâti.

C’est le modèle retenu pour la Tour Eiffel, qui accueille deux éoliennes de 7 mètres de haut depuis 2015 ! 

L’éolien off-shore

• Posées sur le fond marin ou installées sur des plateformes flottantes, les éoliennes en mer, ou off-shore, sont généralement situées à plusieurs kilomètres de côtes. 

Le cas de l’éolien domestique

• Il faut faire la distinction entre l’éolien industriel, constitué de « parcs éoliens » (un ensemble de machines reliées entre elles et raccordées au réseau électrique), et l’éolien domestique, destiné à l’alimentation d’une maison ou d’un bâtiment isolé. 

• Encore très rare en France, l’éolien domestique peut prendre la forme d’une éolienne traditionnelle ou d’une éolienne installée sur pignon. Le mât ne peut excéder 12 mètres de hauteur et la puissance de la centrale est limitée à 20 Kw. 

La chaîne d’énergie d’une éolienne 

• Une éolienne fonctionne grâce à une hélice, mise en rotation par la force du vent. 

=> L’énergie cinétique du vent (le déplacement des masses d’air) est transformée en énergie mécanique.

• Le mouvement mécanique des pales actionne un générateur qui se trouve dans la nacelle. Pour fonctionner, le générateur est couplé à un multiplicateur de vitesse, qui augmente la vitesse de rotation de l’axe interne à 1500 tours/min. 

=> L’énergie mécanique est transformée en énergie électrique. 

• Cette électricité passe dans un transformateur qui élève la tension à 20 000 Volts.

Où va l’électricité produite par les éoliennes ? 

• L’électricité, acheminée par des câbles souterrains, est dirigée vers le réseau général de distribution de l’électricité (cas le plus courant).

Quels sont les avantages et les inconvénients de l’énergie éolienne ?

Une énergie décarbonée, verte et durable

• Seule la construction des équipements éoliens occasionne une émission carbone (11g/Kwh, contre 12 pour le nucléaire !). On estime qu’une éolienne  compense cette émission en seulement une année de fonctionnement. La production elle-même ne produit pas de CO2.

• Son impact sur l’environnement est très faible (pas de pollution, pas d’enfouissement de déchets toxiques ou radioactifs).  

• Techniquement, le vent est une ressource inépuisable : il est lié au soleil, dont l’espérance de vie est encore de 5,5 milliards d’années !  C’est l’absorption du rayonnement solaire dans l’atmosphère qui met en mouvement les masses d’air en jouant sur les températures et les différences de pression. 

Rentabilité, coût et durée de vie des éoliennes 

Le recours à l’énergie éolienne permet, comme le photovoltaïque, une réduction durable de la facture d’électricité. 

• Contrairement aux panneaux solaires, la production énergétique d’une éolienne ne faiblit pas avec le temps.  La durée de vie d’une éolienne est d’environ 25-30 ans. 

• Une éolienne produit de l’électricité jour et nuit. Sa production a tendance à augmenter en hiver, les vents étant plus forts en cette saison. En celà, l’énergie éolienne est en phase avec nos besoins énergétiques, souvent contraires aux cycles d’ensoleillement. 

• Contrairement à une idée reçue, une éolienne fonctionne entre 75 et 95% du temps, à des vitesses variables. 

• Une ferme éolienne est compatible avec la coexistence d’autres activités, notamment agricoles (cultures et élevage). Le propriétaire peut faire le choix de l’autoconsommation (il consomme directement l’électricité produite) ou de la revente, totale ou partielle, de sa production électrique. 

Quels sont les inconvénients de l’énergie éolienne ?

Les caprices d’Eole

• L’énergie éolienne est, comme le photovoltaïque, une énergie intermittente. Elle doit être envisagée en complément d’autres énergies pour obtenir un mix énergétique équilibré.

• Une éolienne a besoin, pour démarrer, de vents supérieurs à 10 km/h. Elle fonctionne à plein régime entre 45 et 90 km/h. Au delà de 90 km/h, une éolienne s’arrête pour des raisons de sécurité. 

• L’implantation d’une éolienne est soumise à des contraintes topographiques et météorologiques. 

Une stricte réglementation

• Les éoliennes sont majoritairement installées en milieu rural, là où la densité de population est relativement faible. En France, elles sont interdites à moins de 500 mètres d’une habitation.

• Les parcs nationaux et les réserves naturelles, les immeubles et sites classés ou inscrits aux Monuments Historiques et les couloirs de migration des oiseaux sont considérés comme des zones protégées. 

• Une attention particulière doit être portée à la présence de radars et d’instruments de mesure (militaires, météorologiques ou de l’aéronautique civile), qui interdisent toute installation. 

• Une demande de permis de construire doit être déposée dès que l’installation dépasse 12 mètres de hauteur. L’obtention est conditionnée à un avis de l’autorité environnementale et à de nombreuses études préalables :  études de faisabilité, études acoustiques, études de danger, études d’impact.

Pollution visuelle et sonore

• L’une des critiques formulées à l’égard des parcs éoliens est de « dénaturer » le paysage. La taille imposante de ces machines et leur esthétisme controversé leur vaut l’inimitié de beaucoup. 

• En France, les éoliennes sont équipées de feux clignotants la nuit pour assurer la sécurité de l’aviation civile. Ces dispositifs peuvent occasionner une gêne visuelle chez les riverains. 

• Le sifflement de l’air dans les hélices, décrit comme un bruit « lancinant » et « saccadé », peut s’étendre à des kilomètres à la ronde, en fonction de la force et de la direction du vent.

Quel futur pour l’énergie éolienne ?

Infographie

Trouver de nouveaux sites d’implantation

Selon RTE, qui gère le réseau de transport d’électricité français, le parc éolien terrestre au 31 décembre 2022 était de 20,6 GW. 

Ce chiffre devrait atteindre les 34 GW à l’horizon 2028, selon la Programmation Pluriannuelle de l’énergie (PPE) publiée par le gouvernement.

Il existe aujourd’hui près de 9000 éoliennes en France, réparties sur environ 2000 parcs.

Saturation et planification

• Les parcs éoliens sont majoritairement concentrés dans certaines régions : Grand Est, Hauts de France, Occitanie et Centre-Val-de-Loire. 

• Cette situation de saturation tend à devenir conflictuelle : les populations s’opposent de plus en plus à l’implantation de nouveaux parcs éoliens sur leurs territoires. 

• Dans un souci de répartition, les développeurs tentent aujourd’hui de conquérir de nouvelles régions. 

Le déploiement de l’éolien off-shore

• L’éolien en mer est une piste privilégiée par le gouvernement pour tenir ses engagements énergétiques pour 2050.

•  Le premier parc éolien en mer français a été mis en service en 2022 à St Nazaire. 

• De nombreux projets sont à l’étude sur les 4 façades maritimes du pays, comme en Méditerranée où 2 parcs éoliens off-shore devraient couvrir 10% de la consommation électrique des régions Occitanie et Provence-Côte-d’Azur. 

Biodiversité et santé humaine.

Quel impact sur l’avifaune et les écosystèmes marins ? 

• La multiplication des parcs éoliens en France suscite l’inquiétude d’associations de sauvegarde de la biodiversité. 

• Cette inquiétude concerne principalement la mortalité des oiseaux et des chiroptères (chauves-souris), qui sont heurtés en vol par les pales des machines. Dans le cas de l’éolien off-shore, ces inquiétudes portent sur les écosystèmes marins.

• D’après une étude de la LPO (Ligue de Protection des Oiseaux), une éolienne tue entre 0 et 18 oiseaux par an. Si ce chiffre est relativement négligeable, la croissance du parc éolien français fait craindre un effet cumulatif. 

Des solutions sont d’ores et déjà mis en avant par les professionnels : 

• Mise en place de caméras et de capteurs pour détecter l’approche des oiseaux

• Systèmes d’effarouchement (drônes…)
• Régulation de l’activité pour cohabiter au mieux avec les heures d’activité de certaines espèces. Le programme Chirotech, par exemple, a permis de modéliser le comportement des chauves-souris sur le site de Bouin (Vendée), pour intégrer ces données à un logiciel de régulation. 

Mettre en place un éolien respectueux de la biodiversité 

• Chaque parc fait l’objet, dans les 3 ans qui suivent sa mise en fonctionnement, d’un suivi d’impact environnemental. Les rapports sont envoyés à la DREAL (Direction régionale de l’Environnement, de l’Aménagement et du Logement). 

• L’ADEME (Agence De l’Environnement et de la Maîtrise de l’Énergie) collabore avec des associations comme la LPO ou l’Union Internationale pour la conservation de la Nature. Un programme commun, « Éolien et Diversité », a été lancé en 2002. 

• Notons aussi la création, en 2022, d’un Observatoire national de l’éolien en mer. La mission de cet organisme est de mieux comprendre l’impact des éoliennes off-shore sur la faune et la flore marine. 

Le « syndrome éolien », un phénomène en cours d’étude. 

• Une préoccupation grandissante concerne l’impact des éoliennes sur la santé humaine. 

• Les infrasons et les ondes électromagnétiques que produisent les éoliennes sont accusés d’être responsables d’insomnies, maux de tête, stress, tension artérielle et nausées. 

Dans l’état actuel des connaissances, les ondes détectées demeurent inférieures au seuil de perception de l’oreille humaine et n’occasionnent pas, d’après les autorités sanitaires, d’effets nocifs sur l’homme. 

CONCLUSION

 En novembre dernier, Xavier Permingeat, directeur d’activité chez UNITe, exprimait son ressenti sur les perspectives de l’éolien terrestre en France. 

Oui, un futur éolien est possible, mais ce futur est indissociable d’une véritable prise de position politique qui a souvent manqué au cours des dernières années. L’énergie éolienne a un rôle à jouer dans la transition énergétique du pays. 

Marie-Yvonnick Legal insiste. Il est essentiel, pour mener à bien de nouveaux projets, de travailler en concertation avec les différents acteurs et d’impliquer les populations  le plus tôt possible. Le défi majeur de l’éolien est en effet son acceptation par les élus et les citoyens.